La découverte des dépouilles d'Arthur, le roi légendaire des Bretons, et de la reine Guenièvre, à la fin du XIIe siècle à Glastonbury, était censée servir les intérêts politiques des Plantagenêt et raffermir leur légitimité dynasiques. La présence des tombes pouvait aussi contribuer à rehausser le prestige de l'abbaye. Mais surtout, un Arthur en terre bénie signifie l'intégration naturelle de la représentation de la mort du roi, élément central de la légende, dans le moule de la pensée chrétienne. À une époque où la matière arthurienne rend de plus en plus transparentes les représentations chrétiennes qui lui sont contemporaines, les enjeux de l'invention de Glastonbury dépassent le contexte politique. L'examen des romans arthuriens rédigés après l'exhumation montre que l'idée de la survie du souverain, trop séduisante pour l'économie romanesque, n'est jamais complètement abandonnée. Cependant, si des éléments du scénario de Glastonbury sont présents à travers la fiction, ils témoignent moins de l'influence de l'idéologie Plantagenêt sur la matière arthuriennne, mais plutôt d'une récupération de la mort d'Arthur en perspective chrétienne. Récupération salutaire au niveau des mentalités collectives, puisqu'un Arthur immortel, tel qu'il apparaît à travers quelques exempla et mirabilia, perd son éclat et sa grandeur, et finit par devenir une figure démoniaque.
Catalina Gîrbea